Réduire les décès dus au trafic routier en Afrique : Un cadre de suivi basé sur les données pour une action efficace
Les accidents de la route constituent une crise mondiale, qui a coûté la vie à 1,19 million de personnes rien qu'en 2021. Cette crise n'est nulle part aussi aiguë qu'en Afrique, où le taux de mortalité routière s'élève à plus de 19 pour 100 000 habitants, soit près de trois fois plus que le taux européen de 7 pour 100 000. Cette statistique alarmante met en lumière un défi critique de santé publique et de développement qui exige une action immédiate et soutenue.
Conscients de la gravité de la situation, les pays africains ont adhéré à la Décennie d'action des Nations unies pour la sécurité routière 2021-2030. Cette initiative ambitieuse vise à réduire de moitié le nombre de morts et de blessés graves sur les routes d'ici à 2030. Cependant, atteindre cet objectif nécessite plus qu'un simple engagement. Il faut un cadre ancré dans la réalité des capacités d'un pays, garantissant qu'il soit à la fois pratique et réalisable, tout en fournissant un mécanisme robuste pour faire le suivi des progrès et cibler les interventions.
Présentation du Cadre de suivi des performances en matière de sécurité routière (CSPSR)
Le Cadre de suivi des performances en matière de sécurité routière (CSPSR) est une initiative développée par le Programme de politiques de transport en Afrique (SSATP). Le CSPSR est conçu pour suivre systématiquement les performances en matière de sécurité routière dans les pays africains, offrant une feuille de route claire pour réduire les décès et blessures liés au trafic routier.
Le CSPSR remplit plusieurs fonctions essentielles. Il permet des évaluations périodiques de l’état de la sécurité routière, permettant aux pays d’identifier les domaines nécessitant des améliorations. Il permet aux pays de prendre la responsabilité de leurs performances en matière de sécurité et de leurs progrès vers les objectifs fixés. De plus, il facilite la prise de décisions fondées sur des preuves, en offrant des informations basées sur des données pour cibler des interventions efficaces en matière de sécurité routière. Enfin, il promeut le benchmarking, permettant aux pays de comparer leurs performances et d'apprendre des bonnes pratiques.
La conception du CSPSR s’appuie sur les piliers de la Décennie d’action et du Plan d’action africain pour la sécurité routière 2021–2030. Il priorise 14 indicateurs de performance en matière de sécurité (SPI) qui mesurent les progrès dans les cinq piliers de l'approche du Système Sûr :
- Gestion de la sécurité routière : Évalue le financement durable, l’autonomisation des agences responsables de la sécurité routière, la gestion efficace des données, des stratégies globales, l’adhésion aux instruments juridiques des Nations Unies, et la planification intégrée des transports et de l’utilisation des sols.
- Sécurité des infrastructures routières : Analyse des caractéristiques telles que la largeur des voies et la qualité des accotements.
- Sécurité des véhicules : Fait le suivi de la conformité aux normes de sécurité.
- Sécurité des usagers de la route : Suit les comportements tels que la consommation d’alcool, l’utilisation du téléphone portable, les excès de vitesse, le port du casque pour les cyclistes et les motocyclistes, et l’utilisation de la ceinture de sécurité.
- Amélioration de la réponse post-accident : Mesure des indicateurs clés comme les délais moyens d’intervention des services médicaux d’urgence (SMU).
L'élaboration du cadre de gestion de la sécurité routière a impliqué un engagement important des parties prenantes afin de s'assurer qu'il reflète les besoins et les opportunités uniques de l'Afrique. Environ 45 participants, y compris des représentants des agences de sécurité routière de 13 pays africains, des partenaires de développement internationaux et des experts techniques, ont collaboré pour établir le cadre conceptuel.
Renforcer les capacités pour améliorer la sécurité routière
Comme les pays africains varient considérablement en termes de capacités de gestion des données, le CSPSR adopte une approche progressive pour sa mise en œuvre. Celle-ci commence par des évaluations complètes des capacités afin de déterminer la capacité de chaque pays à collecter, analyser et rapporter les données sur la sécurité routière. Sur la base de ces évaluations, des programmes de renforcement des capacités adaptés sont développés pour répondre aux besoins spécifiques, en fournissant des formations techniques et les ressources nécessaires.
Pour garantir l’inclusivité, le CSPSR commence par un ensemble minimal d’indicateurs de base que tous les pays peuvent mettre en œuvre. À mesure que les systèmes de données des pays s’améliorent, des indicateurs supplémentaires sont introduits, favorisant une amélioration continue et une adaptation progressive.
Conduire le changement par le leadership et la collaboration
Soutenir la mise en œuvre du RSPMF impliquera de faciliter le partage d'informations, de mobiliser des ressources pour le développement des capacités et de garantir l'alignement avec les objectifs mondiaux de sécurité routière et les Objectifs de Développement Durable (ODD) respectifs. Ces efforts renforceront non seulement la collaboration, mais fourniront également une base pour la prise de décision fondée sur des preuves en matière de sécurité routière au niveau continental.
Une réalisation majeure de cet effort collaboratif est le lancement imminent du Rapport Continental Africain sur la Sécurité Routière. Ce rapport constituera un outil indispensable pour les pays africains, leur permettant d'évaluer et de partager régulièrement les résultats du cadre de suivi proposé. En faisant le suivi systématiquement les performances en matière de sécurité routière et en mettant en œuvre des mesures correctives en temps opportun, les pays africains peuvent réaliser des progrès substantiels dans la réduction des décès et blessures dus au trafic routier, ouvrant ainsi la voie à une mobilité plus sûre et plus inclusive pour tous.